18 novembre 2011: huitième repas

 

C'est avec beaucoup d'appréhension que je me rends à l'Hôtel Mirabeau pour l'ouverture des vins du huitième repas. En effet, j'ai le plaisir d'accueillir un journaliste du journal Le Temps qui publiera un article sur les diners de la dernière chance dans quelques semaines. Et en plus je dois passer par l'épreuve de la séance photo. Les bouteilles sont ouvertes rapidement, et à vue de nez les vins devraient être à la hauteur. La photographe arrive et nous nous lançons dans une mise en scène de mes vieux flacons. La séance se passe dans la bonne humeur et contribue à faire baisser la pression. Le menu sera le suivant:

 

Côtes de Grevenmacher – Luxembourg - 1985

 

Salade de homard tiède du Canada aux morilles

Côtes du Jura – Domaine Buchot - 1983

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Montagny Vase No 5 – Villette - 1981

 

Filets de sole de Bretagne au beurre de crevettes roses

Château Limbourg – Gd vin de Graves - 1966

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Château Péronne – Mâcon-Villages - 1971

 

Médaillons de filets de bœuf - sauce au pinot noir

Légumes de saisons - pommes noisettes

Aloxe-Corton – Etbls Drouant - 1926

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Chambolle-Musigny – Tisserandot – 1947

 

Chariot de fromages

Amarone – Bolla - 1978

 

 

 

 

 

Sur mes huit convives, seul un couple et le journaliste n'auront pas déjà participé à un de mes repas. Je me lance quand même dans un petit speech de présentation pendant que nous dégustons le Riesling luxembourgeois qui laissera une bonne impression à tout le monde. Le vin est plaisant, rond en bouche, on perçoit quelques touches d'hydrocarbure, mais le fruit est encore bien présent.

Nous passons à table et c'est avec beaucoup de plaisir que je goûte le Villette 1981. Comme tous les vieux chasselas que j'ai goutés jusqu'à présent il est droit, précis, avec de jolies notes de fruits jaunes et une touche de carbonique étonnante pour son âge. Le Côtes du Jura est un peu plus évolué; doté d'une belle longueur en bouche, il n'est pas à la hauteur où je l'attendais.

C'est ensuite le Graves et le Mâcon qui entrent en scène. Les avis seront partagés sur ces deux vins. Mon cœur va au Château Limbourg qui va se marié de façon étonnante au beurre de crevettes roses. Le Château Péronne ne crée pas d'émotions particulières; mais quand je pense que nous sommes en face d'un bourgogne village de 40 ans, je me dis que je commence à être difficile. Après plusieurs dizaine de minutes, le Château Péronne acquière un nez de vanille très surprenant.

Le choc de la soirée se fera sur les rouges. Les robes sont magnifiques, l'Aloxe, qui provient des caves du restaurant Drouant à Paris, a une toute légère teinte orangée alors que le Chambolle est rouge sang. On ne donnerait son âge à aucun des deux. En bouche ils sont l'archétype des vieux bourgognes. Si on arrive à passer par-dessus les arômes de sous-bois et de truffes, on retrouve des notes de framboises tout simplement sublimes. Ces deux vins sont parmi les meilleurs dégustés lors de mes diners.

L'Amarone Bolla 1978 souffre de suivre ces deux grands vins. Il accompagne bien les fromages, mais la tête est ailleurs. C'est le destin des grands vins qui en côtoient des immenses.

Les discussions se poursuivent autour du café et je quitte l'hôtel le cœur léger. Mes vins ont encore été à la hauteur et le journaliste a eu l'air séduit. Vivement le prochain diner!